Gigue le ridé

Gigue est un vieillard sec. Il a la peau tannée comme l'ont tous les paysans qui ont passé leur meilleures décennies au soleil et au vent.
Aujourd'hui, a plus de 70 ans, il est usé.
Sa longue expérience d'existance l'a en quelque sorte immunisé contre les surprises, bonnes ou mauvaises. Il n'est pas dans l'âge où l'on mord la vie à pleines dents, mais plutôt dans celui où l'on contemple le passé et considère le présent comme un bonus accordé par le temps. Quant à l'avenir...
Gigue est vieux, mais ce n'est pas un sage ancestral. Il cultive simplement ce que la vie lui a appris.

Son histoire commence au début de l'adolescence, ce qui est relativement tôt chez les humains. Ce qu'il y avait avant... pas de traces.

Il fût retrouvé plus mort que vif sur une plage à l'ouest de ??? par une famille de paysans de ???
D'où venait-il? Mystère. Les peintures qu'il y avait sur le corps semblaient venir de quelque tribu primitive, comme on en trouve par delà les montagnes de??? .
Gigue se remit bien vite et, plus qu'une bouche à nourrir, il devint une force de travail dans la ferme familliale et même dans le village. Il ne connaissait pas grand-chose à la terre, mais était habile et apprit vite.
Au départ, son père adoptif, Coltan, le mit aux travaux les plus durs, comptant sur ses jeunes années. Gigue ne s'avéra que moyennement efficace. A l'époque, son frère cadet Guesh s'occupait du troupeau de chêvres, mais s'acquitait mal de sa tâche. C'était un jeune et solide gaillard qui n'avait que faire d'un travail "de fille ou de gamin". Il était accompagné par un chien aussi méchant que mauvais gardien. Régulièrement, une brebis était perdue ou revenait estropiée par ce dernier. Le père se mettait alors en colère noire et injuriait copieusement son fils. Les coups, eux, étaient réservés au chien qui en devenait chaque fois plus bête et plus méchant.
Un jour, deux bêtes manquaient à l'appel. Deux brebis en moins, c'était un risque important de disette en hiver. Le père, furibond, cria plus que d'ordinaire et cogna plus fort le chien. La limite de ce dernier était atteinte. Dans ses yeux brillait la même lueur que celle qui traverse le regard d'un loup pris au piège et qui apperçoit enfin son bourreau.