La compagnie des Âmes perdues
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Alvierine - Lutin [En Construction]

2 participants

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Alvierine - Lutin [En Construction] Empty Alvierine - Lutin [En Construction]

Message  Sheithan Lun 12 Avr - 15:11

Nom :
Damodred

Prénom :
Alvierine

Age :
90 ans

Taille :
1m26

Race :
Lutin

Classe :
Jorniste


BG :
C’est loin tout ça. Loin et vieux. Aussi vieux que moi. Z’êtes ici pour entendre ma vie ? Vous allez l’entendre alors.
C’était un soir de printemps, l’air était encore frais du dernier rude hiver encaissé. Les perce-neiges se laissaient aller nonchalamment au gré des courants de vent tandis que des cris se faisaient entendre. Ils provenaient du village le plus proche, construit à même les arbres, dans la forêt. Oh c’est clair, village c’est un bien grand mot pour qualifier les cinq ou six petites baraques rustiques et bancales aménagées au sol ou dans les arbres. Mais c’était mon village. Bref. Les cris provenaient d’une chaumière située au pied d’un érable, les bruitages venaient visiblement d’une femme qui accouchait. Bientôt les derniers râles d’effort se firent entendre et de nouveaux piaillements, ceux la tout frais, se firent entendre. Tout le village était réuni et applaudit à l’unisson ce nouvel être qui voyait le jour. On lui donna le nom d’Alvierine née d’un Damodred et d’une Mandarb. Mes parents n’étaient pas uni par les liens sacrés du mariage, mais cela n’avait aucune importance dans ce petit hameau qui devait en tout compter quelques dix âmes. Enfin onze maintenant. La fête fut petite mais bien animée, une bonne ambiance au rendez vous.
Je grandis, comme tout lutin normalement constitué. La vie était calme et monotone dans le village, on vivait des produits de la forêt et de ce qu’on pouvait troquer parfois avec quelques voyageurs égarés. Nous n’avions que peu de contacts avec le monde extérieur. Mes parents étaient bons avec moi, ils me traitaient toujours bien et avec justice. On racontait que ma mère avait hérité certaines capacités de ma grand-mère…Parfois, elle pouvait voir l’avenir. Pas nettement, pas souvent, mais des fois elle voyait certains chemins à emprunter et leurs alternatives. Elle disait que c’était la sagesse de son arbre qui lui permettait parfois d’avoir des visions. On me baptisa, bien entendu, avec mon arbre. Il était grand, majestueux…Le tronc était de bonne taille et ses branches subissaient avec fermeté et dignité les aléas des vents indolents. Et venu la saison, il fleurissait, des petites fleurs blanches rosées dont le centre tirait sur le rose foncé. Un cerisier.
Alvierine - Lutin [En Construction] 395708793
Dans les années qui vinrent, je m’occupais beaucoup avec ma mère à l’aider pour l’entretien de la maison. Je passais du temps avec mon père qui m’apprenait quelques bases sur les plantes, les arbres, les animaux…Et le reste de mes journées, je flânais non loin de mon arbre. Je sentais le lien qui nous unissait, tellement fort. Rien qu’en le regardant je pouvais sentir chacune de ses feuilles, chaque fleur, si un oiseau se posait sur une de ses branches…Il était le plus beau des arbres à mes yeux. Et un jour, alors que je devais avoir 6 ou 7 ans, quelque chose se produisit. Je me trouvais sous mon cerisier, écoutant le vent passer entre ses branches, regardant le soleil projeter son ombre sur le sol…Mes yeux sombres étaient à demi fermés et un sourire vague de béatitude planait sur mes lèvres fines. J’entendis alors quelque chose qui ressemblait fortement à un couinement. Je tournais mes yeux sombres dans la direction du bruit, un buisson. En clignant un peu mes yeux je me relevais et m’approchais de la plante qui commençait à bouger un peu. Il y avait quelque chose dedans. Je me baissais et écartais de mes mains les branchages pour poser un regard ahuri sur une bien étrange créature. L’animal ressemblait très vaguement à un chat. Même taille, des petites oreilles pointues mais avec des touffes de poils et de plumes mélangés en leur extrémité. Des yeux aux prunelles fendues surplombaient un petit museau allongé avec une truffe disproportionnée par rapport au reste du corps. Le corps était celui d’un félin, sauf que les pattes se terminait comme des bras et des jambes humanoides et que la longue queue fine finissait par une touffe de poils et de plumes, comme les oreilles. Entre les omoplates deux petites ailes de chauve souris tremblaient de froid et de peur tandis que la créature me fixait avec un air farouche et incertain. La robe de la petite chose était de couleur fauve avec d’étranges motifs noirs. Je n’avais jamais vu pareille créature de toute ma vie de gamine ! C’est un sourire extatique qui se peignit sur mes traits et je présentais mes mains à une distance raisonnable du petit être.

« Aller, viens, n’aie pas peur, je ne vais pas te faire de mal… »

L’animal s’abaissa dans la direction de mes mains tendues, semblant humer l’air un instant avant de me regarder à nouveau et de prendre subitement la fuite. Je me redressais et courrais un peu derrière lui mais il avait déjà disparu. J’affichais une mine triste et dépitée et puis finalement je haussais une épaule et retournais au village. Le jour d’après fut mémorable car il changea le reste de ma vie. Je rentrais donc au village, je soupais avec ma famille et finalement m’endormis dans mon petit lit douillet. Le lendemain ma mère me leva et me fit déjeuner. Elle se stoppa un instant et me regarda longuement avec une lueur profondément neutre dans ses iris clairs. Après plusieurs secondes, elle esquissa finalement un petit sourire. Je ne savais pas, il était bizarre ce sourire…Pas heureux mais pas triste…ou peut être les deux. Elle me dit :

« Tu as encore tellement à voir. Il te faudra être solide face au vent et ne jamais te rompre malgré les intempéries. »

Je ne comprenais pas ses paroles. Et je ne devais les comprendre que beaucoup plus tard. J’aidais ma mère au ménage puis allais prendre mes leçons avec mon père, sur les arbres, l’astronomie, quelle plante faisait quoi, comment les mélanger…J’écoutais toujours avec assiduité ses cours. Puis, vers la fin de la journée je retournais près de mon cerisier. Il était toujours là, fièrement dressé vers le ciel, le vent provoquant une tempête de pétale sous ses branches et autour de lui. Je soupirais de bien être lorsque je m’approchais pour poser une main sur son tronc, mes cheveux bruns se dérangeant sous les diverses bourrasques. Un mouvement me fit tourner la tête et je clignais des yeux pour reconnaître l’animal de l’autre jour.

« Tu es revenu ! »

Je souriais à pleines dents et m’approchais. La créature tressaillit et se redressa sur ses pattes pour tourner les talons et prendre à nouveau la fuite. Je fronçais les sourcils. Cette fois je n’avais pas l’intention de me laisser distancer ! Je commençais à courir de toutes mes forces derrière l’animal, je voyais sa touffe de poil et de plumes s’agiter parfois, changer de direction. Je lui intimais par moment de m’attendre. Mais en vain. Je courrais pendant plusieurs dizaines de minutes, j’étais fatiguée. Et puis soudain je sentis un choc sur mon pied, une racine d’arbre venait de glisser en travers de ma route et je basculais. Je m’attendais à rencontrer le sol sans douceur d’un moment à l’autre mais non, je continuais de tomber. Rouvrant les yeux, je m’aperçus bien vite que j’étais tombée d’une petite falaise et que ma chute durerait encore quelques secondes. Dans un cri étouffé de désespoir je heurtais le sol et tout devint noir. Je ne sais pas combien de temps cela dura. Je restais inconsciente un moment et quand mes yeux se rouvrirent, c’était l’aube…Ma vision était trouble et j’avais mal. Des yeux verts fendus en leur centre me regardaient tandis qu’une langue râpeuse léchait un liquide carmin qui s’échappait d’une ouverture à ma tempe. Je me rappelais difficilement ce qu’il s’était passé. Le petit animal était la, me reniflant avec inquiétude. J’essayais de me relever mais j’émis un cri de douleur. Mon thorax me faisait souffrir et ma jambe droite refusait de faire un mouvement de plus. Les larmes aux yeux et les dents serrées je tentais néanmoins de m’asseoir sur mon séant. La petite créature tressaillait à chacun de mes gémissements de souffrance sans que je comprenne pourquoi. Puis ce fut étrange, l’animal se mit à faire des mouvements, comme une danse. Ou quelque chose s’en approchant. A la fin de sa chorégraphie je me sentais mieux, moins endolorie et j’avais moins mal. Je souriais faiblement et posais ma main avec délicatesse sur sa tête.

« Merci… Désolée de t’avoir poursuivi…J’ai été idiote. »

La petite créature ne bougea pas et se mit à ronronner quelque peu. Je riais un peu et continuais à la caresser avant de me redresser pour déterminer où j’étais et comment j’allais me sortir de ce gouffre. C’est la que j’entendis des voix familières qui hurlaient mon nom. Je soupirais de soulagement et criais le plus fort que je puisse.

« Je suis là ! Je suis ici ! Venez me chercher ! »

Bientôt je fus rejoint par les gens du village qui m’aidèrent à remonter. Je sautais dans les bras de ma mère en sanglotant, c’était beaucoup d’émotions pour une petite fille de mon âge.

« Comment as-tu pu ? Tu as fait une chute de 20 mètres tu devrais être…en sale état… » Demanda ma mère d’un air effaré mais heureux.

Je souriais et séchais mes larmes en me retournant vers le petit animal qui n’avait pas bougé. Lui savait quelque chose que pour le moment j’ignorais encore. Il regardait tout le village avec un calme serein que je ne comprenais pas. Il n’était pas plus effrayé que ca ? Quoi qu’il en soit je le pointais du doigt et je lançais.

« C’est ce petit qui m’a aidée à aller mieux ! J’étais blessée et il a dansé et je n’avais plus mal. »

Ma mère suivit mon doigt des yeux et fixa le vide devant elle. Tous les gens du village eurent un air d’incompréhension qui s’afficha sur leurs traits. Ma mère eut un sourire indulgent et passa un bras autour de mon épaule.

« Tu dois t’être cognée un peu plus fort que ce que nous avions imaginé. Viens, rentrons. »

Je protestais avec vigueur, disant que j’allais bien, que l’animal était vraiment la. Je me tournais pour le regarder à nouveau. Il fixa mes yeux sombres de ses prunelles émeraude et les ferma à demi, ne bougeant toujours pas. Je ne sais pas pourquoi, mais j’étais triste de le quitter. Je l’ignorais encore mais il venait de changer ma vie. Les jours passèrent. La créature ne revint pas vers mon cerisier. J’étais triste, je me sentais déprimée et même le fait de regarder le soleil filtrer à travers les feuilles de mon arbre n’arrivait pas à égayer mes sombres pensées. Et puis, un matin alors que j’allais chercher de l’eau à la rivière, l’espèce de chat vint se frotter à moi en émettant un feulement léger. Sans hésitation, je lâchais mon sceau d’eau pour le prendre dans mes bras et le câliner, le caresser, lui disant combien il m’avait manqué et que je ne voulais plus qu’il parte comme ca. Depuis lors, Lyam resta avec moi. C’était le nom que je lui avais donné. Je rentrais à la maison avec Lyam et mon eau, toute fière que mon « chat » soit revenu. Je le pris contre moi et le tendis à ma mère.

« Regarde maman ! Lyam est revenu…tu sais l’animal qui m’a sauvée. »

Ma mère me regarda l’air neutre et un peu perplexe. Elle fixa mes mains qui brandissaient du vide puis elle souffla d’une voix douce mais ferme.

« Il n’y a rien ici, ni personne à part toi et moi. Veux-tu arrêter tes sottises, cela me fait peur ! »

Je clignais des yeux sans comprendre, la bouche un peu ouverte d’incrédulité. Je reprenais doucement Lyam contre moi. Ce dernier vint se jucher sur mon épaule et il entama une toilette soigneuse et bien méritée. Mais…il était bien présent. Je ressentais son poids sur mon épaule, je sentais son odeur de terre et de nature…je pouvais même percevoir sa chaleur…Je baissais la tête en acquiesçant devant la mine perplexe de ma mère. Je bredouillais une excuse et tournais les talons pour sortir de la maison en courant, les larmes aux yeux. Je n’étais pas folle ! Lyam était réel ! Il était là ! Ce n’était pas moi qui étais folle !
J’atteignais l’adolescence dans la plus grande tranquillité, mais la plus grande incompréhension. Chaque jour qui passait semblait vouloir me pousser à quitter cette vie morne et routinière. Une voix dans ma tête m’intimait de m’en aller, elle me disait que je ne serais jamais bien ici. Les jours passèrent, s’égrenèrent de manière de plus en plus lente…L’ennui me guettait malgré le fait que Lyam ne me quittait plus. Je n’avais plus besoin de lui parler, nos échanges de regards suffisaient à nous entretenir silencieusement.
L’automne arriva. C’était la saison de mes 22 ans. J’étais devenue gracieuse, fine et belle. Pas merveilleusement belle mais j’étais mignonne pour une lutine. Cela faisait quelques années que mes parents avaient arrêté de m’enseigner quoi que ce soit, arrivant au bout de leurs compétences personnelles. Je m’étais affinée dans la course et l’équitation. A force de me promener en forêt j’avais également acquis des capacités comme par exemple me déplacer discrètement, savoir me camoufler, rester vigilante et parfois même me déguiser en buisson pour passer totalement inaperçue.
Cet automne la, ce 22ème jour, j’étais en train de perfectionner mes talents de camouflage quand j’entendis un bruit beaucoup plus loin dans la forêt. Je me rapprochais en silence et vit une silhouette encapuchonnée. Sur son épaule gauche, il y avait un petit animal bizarre. Il ressemblait à un singe mais il avait le museau d’un reptile, une crête sur le dos comme un lézard et une queue touffue comme celle d’un renard. Je fronçais un peu les sourcils et je me relevais d’un bond tout en sortant une petite dague de ma bottine. A peine ai-je esquissé le mouvement que je me retrouvais figé dans les airs, le petit singe effectuant une danse bizarre. Mon sang ne fit qu’un tour. J’étais morte, cet être inconnu allait me pulvériser maintenant. C’est sûr, je ne reverrais jamais mes parents. La silhouette de noir vêtue se tourna vers moi et sembla me jauger longuement, son attention se reportant sur mon épaule gauche. Sur Lyam. Je sentis mes mouvements être libérés et me rattrapais de justesse pour ne pas m’affaler sans aucune dignité par terre. Une voix grave s’éleva alors.

« Comment s’appelle-t-il ? »

Je relevais le menton et pinçais un peu les lèvres en haussant un sourcil.

« Je ne vois pas de qui vous parlez. Ici il n’y a que vous, moi et votre petit animal bizarre. »

L’homme en noir me regarda plus longuement cette fois, restant parfaitement silencieux pendant ces longues minutes qui me semblèrent durer des heures. Puis finalement il souffla.

« Je vois. Tu ne sais pas qui tu es et ce qu’il est. Je suis un mage, un jorniste pour être précis…Voici mon danseur, il s’appelle Kenneth. »

« Vous vous trompez surement, c’est un animal qui m’a aidée une fois et il est juste…mon animal de compagnie. »

« Celui qui ne sait rien ne peut rien comprendre. Tu dois certainement sentir que tu n’es pas achevée, que tu as encore quelque chose à accomplir…Tu te sens attirée ailleurs. Personne ne te comprend, sauf ton animal. Est-ce que je me trompe ? »

Je reculais d’un pas, mon visage prenant une mine profondément étonnée. Comment pouvait-il sortir des choses aussi précises sur mon sujet ? Il avait résumé mon état d’esprit de ces dernières années en quelques mots. Une partie tout du moins.

« C-comment… » Fut tout ce que j’arrivais à prononcer comme paroles. Le mage ne dit pas grand-chose. Il me demanda de l’amener à mes parents. J’étais encore jeune, pas encore majeure d’après la loi des lutins. Arrivé à ma maison, il s’entretint avec mes parents pendant de longues heures. J’avais été exclue de la conversation. Boudant et grognant par moment contre le fait qu’on me traite encore comme une enfant, je prenais néanmoins mon mal en patience, essayant parfois d’écouter à travers la porte. Finalement l’homme sortit de la maison de mes parents, ces derniers à sa suite. Il déclara.

« Je vais t’emmener avec moi et nous trouverons ton Collège. Tes parents nous accompagneront. Mais tu as le choix : soit tu décides que tu ne veux pas partir et tu poursuis ton existence ici, renonçant ainsi à la connaissance et à l’apprentissage de la magie, soit tu décides que tu viens et tu renonces à la vie paisible et facile que tu as ici pour t’ouvrir au monde extérieur. Réfléchis bien avant de choisir ta voie. L’une comme l’autre ont des avantages et des inconvénients. »

Le choix était vite fait pour moi. Je ne comptais pas rester dans ce trou de forêt, agréable mais particulièrement à l’écart du reste du monde, jusqu’à la fin de mes jours. Je fronçais les sourcils et relevais le menton avant de dire d’une voix sûre et ferme.

« Je viens ! »

Le mage hocha la tête et je crus entendre ma mère émettre un petit hoquet étouffée. Nous partîmes donc le lendemain, mes parents quittant leur maison avec un regret non dissimulé. J’avais fait un choix égoïste, je venais de me rendre à quel point quand je croisais le regard triste de ma mère et celui, déterminé mais perdu de mon père. Le choix était fait, je ne reviendrais pas en arrière. Ils avaient également fait le choix de m’accompagner dans le cas où je décidais de partir. Le trajet fut long, pénible. L’homme en noir m’instruisait, il m’apprenait le keshite au passage ainsi qu’une quantité de choses sur les Danseurs. Ainsi Lyam était un Danseur. Il m’apprit également les bases de la diplomatie et quelques astuces pour faire passer les mensonges plus facilement. Le voyage dura plus de deux semaines. Durant le trajet nous passâmes dans quelques villes, dont les tailles et le nombre d’habitants me laissèrent pantoise. C’était tellement merveilleux, c’était beau…Mais c’était dommage, la forêt était plus belle et plus grande que ces villes réunies…Et puis c’était froid, il n’y avait pas d’âme dans ces constructions. En plus il y avait du bruit. Beaucoup trop de bruits pour mes pauvres oreilles de lutin. Mais c’était quand même impressionnant de voir les gens s’entasser comme ça. J’arrivais difficilement à croire que c’était par plaisir qu’ils le faisaient.
Finalement, quelques jours plus tard, notre joyeuse bande arriva dans une petite ville, ou un grand village, quoi qu’il en soit c’était 20 fois plus grand que mon village natal. Lyam s’étira et commença à danser gaiement, me tourner autour avec vivacité et énergie. Le mage qui était devenu mon mentor, il s’appelait Kalyn, se tourna et regarda le comportement de mon Danseur. Il se contenta de hocher la tête avant de nous entraîner vers une bâtisse plus grande que les autres. Ca ressemblait à quelque chose entre une auberge et un lieu de culte. Nous y entrâmes et je m’arrêtais net, ma bouche s’ouvrant progressivement pour carrément paraître comme si ma mâchoire allait se décrocher. Il y avait tant de personnes et de races différentes…Des races que je ne connaissais pas…Et une quantité de Danseurs différents. Un sourire s’épanouit sur mes traits tandis que je m’émerveillais devant ce spectacle. C’était féerique, même dans mes rêves les plus fous je n’avais jamais osé imaginer ceci. Mes parents restaient également interdits, même s’ils ne voyaient pas les Danseurs, ils pouvaient certainement ressentir l’atmosphère particulière du lieu. Kalyn se tourna vers eux et dit.

« Vous avez pu voir le lieu, peu de non initiés ont cette chance. Par contre je vais vous demander de partir, votre fille va dès à présent entamer son instruction ici. Vous pourrez loger dans la ville, à proximité, mais vous ne pouvez pas venir ici. »

Mon père ne sembla pas vraiment très content mais ma mère le calma avec un sourire. Ils prirent finalement congé et je restais seule avec mon mentor qui me fit faire le tour des lieux. C’était immense, je n’aurais jamais imaginé en le voyant comme ca, de l’extérieur. Je découvrais mes quartiers, puis ma formation commença. Dire qu’elle fut facile ne serait pas honnête. Je souffrais beaucoup durant mes cours, reprenant des bases et des connaissances que je croyais connaître, mon caractère un peu hautain et mon sens de la répartie cinglante ne m’aidèrent pas vraiment à me faire bien voir par mes différents instructeurs. Et puis il y avait Matrim. Matrim était un lutin, un peu plus âgé que moi, également destiné à être jorniste. Il m’aidait dans mes révisions, il me calmait quand je m’emportais contre les instructeurs et riait quand je me faisais réprimander. Je l’aimais bien…Lui aussi. L’amitié qui se stabilisa se transforma ensuite en sentiment un peu plus profond. J’achevais ainsi une année, puis deux, puis trois. J’avais acquis une connaissance de mon danseur acceptable et je maitrisais quelques sorts. On m’accepta parmi les mages et je reçus la gemme des jornistes que je m’empressais de pendre à mon cou. Je sortais de l’école dès la fin de la remise des « diplômes » et je courrais l’annoncer à mes parents, j’entrais dans la demeure.

« Maman ! Papa ! J’ai réussi ! Je suis jorniste ! Regardez regardez ! »

J’exhibais ma gemme avec fierté et une joie non contenue. Mon père me félicita et ma mère me fixa longuement avant d’esquisser un sourire…triste. Oui triste. Je la regardais sans comprendre. Il y avait tant de choses que je ne comprenais pas…Pourquoi elle avait l’air si déprimée tout d’un coup. Des larmes lui montèrent d’ailleurs aux yeux tandis qu’elle balbutiait quelques félicitations tremblantes. Etait-ce la joie de me voir aboutir ou de la réelle tristesse ? Je ne le savais pas. Je ne comprendrais que quelques heures plus tard que c’était un peu de ces deux sentiments qui transparaissaient dans son regard larmoyant et ce faible sourire mélancolique. J’aurais du lui demander ce qui se passait, j’aurais du…faire et dire tellement de choses en cet instant la. J’avais 25 ans à présent, j’étais majeure et je filais pour voir Matrim qui devait lui aussi avoir reçu son acceptation. La plupart des mages partaient déjà du Collège pour rejoindre leurs contrées natales ou pour voyager un peu avant de revenir.

« Matrim ! J’ai été reçue ! Et toi ? Montre-moi ta gemme, dépêche toi ! »

Le taquinais-je un peu tout en cherchant le pendentif. Il sourit et me le montra tout en bombant le torse. Je lui assenais un petit coup de coude dans le ventre en le félicitant. Nous étions tous les deux mages à présent ! C’était un rêve qui se réalisait. Nous parlâmes longtemps, la nuit commençait d’ailleurs à tomber. Je parlais du monde que je voulais voir, des choses que je voulais faire et lui m’écoutais, hochant parfois la tête tout en souriant avec un air contemplatif. Et puis soudain, il souffla.

« Faisons ces choses ensemble. »

Je le regardais de mes yeux sombres, sans forcément comprendre. Il pencha la tête de coté et s’approcha. Avant que je ne saisisse le but du mouvement, ses lèvres s’étaient posées sur les miennes. Il se recula un peu en me regardant dans les yeux.

« Je veux que tu m’épouses. Je veux qu’on fasse tout ce que tu as raconté ensemble. »

Un sourire niais et béat s’empara de mes traits puis je le chassais d’un geste de main un peu tremblant, mon cœur ne supportant plus de rester tranquillement à un rythme régulier dans ma poitrine. Troublée, je ne répondis rien dans un premier temps. Puis un vague assentiment balbutié sortit d’entre mes lèvres. J’étais aux anges bien sûr, c’est pour ca que je ne pouvais plus parler.

« Alors ? Tu veux m’épouser ou bien pas ? »

J’allais donner ma réponse quand soudain des hurlements me glacèrent le sang. Je me relevais d’un bon, Lyam tressaillant à ma réaction. Il se passait quelque chose au village. Je me hâtais de sortir du bâtiment, Matrim sur mes talons tandis qu’une odeur âcre et douçâtre m’envahit les narines. Je plaquais ma main sur le bas de mon visage avant de voir une silhouette pseudo humanoïde. Des bouts de chairs pendaient de partout de son corps et il était à demi putréfié. J’écarquillais les yeux d’horreur et d’incrédulité alors que plus loin on hurlait.

« Des goules ! Il faut leur planter quelque chose dans le cœur pour les tuer ! »

« Elles sont trop nombreuses nous n’arriverons pas à AAaaaaaaaaaaaahhhhhh…. »

En effet, il y en avait beaucoup. J’avais reconnu les goules, pour avoir lu des histoires à leur sujet. Elles n’attaquaient jamais en bandes d’habitude ! Je fronçais les sourcils et me précipitais. Mes parents. Faites qu’ils aillent bien ! Je poussais la porte de la bâtisse et m’engouffrais à l’intérieur, mon pied heurtant un corps à terre. Mes yeux sombres s’abaissèrent et je pus distinguer ce qui restait de mon père. Une tristesse sans nom et une haine incommensurable formèrent le cri silencieux et les larmes qui jaillirent de mes yeux. La bouche ouverte, sans pouvoir hurler ma douleur, je restais figée avant qu’on m’assène un violent coup qui me projeta plus loin, contre le mur. J’émis un glapissement étouffé et me relevais tout prenant ma dague, dissimulée dans ma bottine. Une goule se dressait sur mon chemin et je m’élançais sur elle avec hargne, plantant ma dague non loin du cœur. Au même moment une autre lame surgit de sa poitrine, transperçant son cœur. Matrim avait porté son coup dans le dos de la goule et me souriait en m’adressant un clin d’œil mutin. La goule fut réduite en poussière et je retombais sur mes pieds, haletante. Je m’abaissais pour contrôler que mon père fut bien mort avant de prendre un air atterré et de me relever. Matrim me prit dans ses bras pour me réconforter tandis qu’un cri à l’étage attira mon attention. Je m’extirpais de l’étreinte avec la souplesse et la félinité d’un chat échaudé et me précipitais dans la chambre de ma mère. Encore une goule. Encore. Je me jetais sur elle et lui plantais à plusieurs reprises la dague dans le dos pour arriver à percer enfin son cœur. Ma mère agonisait sur le sol, du sang se répandait rapidement sur le sol, s’échappant de son ventre à demi vidé. Elle hoqueta en souriant doucement.

« Je…Je le savais. J’avais…vu…ça. Tu dois partir…tu…me laisser. »

Du sang commençait à s’échapper de sa bouche, créant des filets carmin comme des serpents funestes, sur ses joues et son cou.

« Pars…maintenant…Ta destinée…Tu…encore beaucoup…à voir. Hâte…toi…sinon Ma… »

Les yeux se figèrent et la bouche resta entrouverte tandis que le visage de ma mère glissa un peu sur le coté. Je roulais des yeux emplis de larmes mais furieux et fous tandis que je serrais le corps sans vie qui m’avait mis au monde. Ma haine était telle que je voulais voir jusqu’à la dernière de ces goules mourir de mes mains. J’attrapais la dague de ma mère, gisant sur le sol, et je redescendais. Matrim me fixait d’un air grave et il avait certainement ses raisons. J’étais couverte de sang et mon regard ne devait pas être des plus amènes. Je sortis de la maison pour découvrir l’horreur et la désolation. La plupart des habitants gisaient à terre sans vie, quelques mages également. Les derniers survivants étaient des jornistes débutants qui essayaient de se défendre tant bien que mal. Les flammes commençaient à courir sur quelques bâtiments, avalant le bois, ravageant les vies, faisant disparaître les traces du carnage. Avec un cri d’hystérie je m’élançais sur la goule la plus proche, Matrim poussant également un hurlement pour s’attaquer à une autre de ces créatures. Le combat fut rude. Mais l’acharnement que j’y mettais eut raison de mes opposants. Bientôt, la chaleur fit fuir les dernières goules, les chassant à l’ombre des bois. Je rejoignais Matrim pour le trouver, blessé et fatigué. Je l’aidais à regagner les bois, évitant l’incendie qui ravageait notre collège. Nous étions tous deux harassés, pris par la tristesse et la rage profonde d’avoir été attaqué et battu sur notre terrain. Lyam dansa quelque peu et je me sentis moins fatiguée, je lui demandais de faire la même chose pour Matrim et ses plaies se résorbèrent. Nous regardâmes notre passé si récent s’envoler en fumée en silence.
Nous restâmes jusqu’à ce que la dernière bribe de fumée ait quitté les décombres de la cité. Je baissais la tête, les larmes avaient cessé depuis longtemps de couler, comme taries. Mes yeux se posèrent sur Matrim et il me fixa en hochant la tête. Nous quittâmes les lieux pour prendre la direction de la forêt et de la ville la plus proche. Nous étions fatigués et la marche n’arrangea pas les choses. Nous croisions parfois une goule égarée que nous achevions sans aucune difficulté. Trois jours et enfin, la ville s’annonçait. Matrim allait de plus en plus mal. Je ne comprenais pas ce qui lui arrivait. Même s’il ne semblait pas blessé physiquement, il réclamait toujours à manger, constamment, et ce même s’il faisait un bon repas. Je me mis en quête d’un herboriste qui examina Matrim. J’expliquais ce qui s’était passé et il devint livide. Il m’expliqua que les goules pouvaient infecter les personnes qu’elles blessaient. Mes sens me trompèrent et je dus me retenir à un mur pour ne pas m’écrouler par terre. Il était trop tard pour faire quoi que ce soit. Il n’avait pas les herbes nécessaires. Je serrais les dents et redressais Matrim en hurlant.

« Vous mentez ! Je suis sûre que vous mentez ! »

Je le relevais et je partais, l’aidant à marcher en passant un bras autour de mes épaules. Je le trainais jusqu’à la bibliothèque où je réussi à trouver quelques livres qui parlaient des goules. Et ce que j’y lu me fit froid dans le dos. Je reposais bien vite le livre et posais mes yeux sur Matrim qui me souriait, se forçait à sourire. Je ne savais pas quoi faire. Détournant les yeux, masquant des larmes que j’avais cru ne plus jamais pouvoir laisser sortir, je l’aidais à se relever pour sortir de la ville et retourner dans la forêt.

« Pourquoi est-ce que nous retournons en forêt Alvi ? J’ai faim…. »

« C’est justement parce que tu as faim que nous retournons en forêt…Matrim…Tu es en train de…de devenir comme…elles tu sais. »

Il resta interdit un instant, plissant un peu son nez retroussé et esquissant un sourire empreint de défaitisme et de résignation. Il hocha la tête et souffla.

« Je sais, j’ai entendu l’herboriste. Je suis fatigué Alvi…On peut se reposer un moment ? »

J’acquiesçais et je le mis à l’abri d’un arbre pour préparer un feu de branches mortes et de feuillages divers. Il s’endormit rapidement. Je réfléchissais, je ne savais pas quoi faire. Je venais de perdre presque tout ce qui comptait. Lyam se frotta à ma joue doucement, comme pour me réconforter et je souris, lui offrant une caresse douce et amicale. Il me restait Lyam et Matrim…La nuit passa et je veillais sur eux, restant éveillée pour ne pas manquer de guet, au cas ou une goule ou deux s’aviserait de venir dans le coin. Je jetais un œil aux anciennes blessures de Mat et constatais qu’il n’en restait rien. Ce dernier se réveilla et me sourit légèrement. Je m’approchais en sortant ma dague.

« Ne bouge pas…Je veux contrôler ce que l’herboriste a dit. »

Il resta silencieux, se contentant juste de hocher la tête à ma déclaration. Je pris son bras et y imprima une profonde entaille du bout de ma lame. S’il se transformait en goule, la blessure devrait se régénérer toute seule. Et j’attendais. Quelques heures plus tard, la plaie commençait à progressivement se refermer. Je serrais les dents et secouais la tête, les larmes me montant aux yeux. Matrim me fixait doucement et il souffla.

« Je veux rester avec toi… Jusqu’à la fin…Tu sais ce qu’il te reste à faire…J’aimerais juste que tu le fasses tant que je suis moi et pas un monstre. »

Je secouais la tête et reniflais bruyamment tout en émettant de véhémentes protestations.

« Je ne peux pas ! Je ne peux pas faire ça Matrim ! Je ne veux pas te perdre…Je veux que tu vives, je veux qu’on voyage et qu’on se marie…je veux… »

Les paroles moururent au fond de ma gorge tandis qu’il prenait mes mains entre les siennes pour les embrasser légèrement.

« Tu m’as perdu au moment où cette goule m’a attaquée. Je ne suis déjà plus vraiment moi. Alors dépêche toi de m’éliminer avant que je ne te fasse du mal et que le vrai Matrim disparaisse totalement…Je t’en supplie Alvierine. »

Je ne pouvais pas…Mais je savais qu’il disait vrai. Je l’avais déjà perdu. Et j’avais compris à présent ce que ma mère m’avait dit il y a longtemps : « Tu devras être forte, ne jamais casser, être solide face aux vents ». Et son sourire triste. J’écarquillais un peu mes yeux embués par l’onde salée. Elle savait. Elle avait vu sa mort arriver…C’est pour ca qu’elle avait eu ce sourire si ambiguë. Et ses dernières paroles. Je serrais un peu les dents.

« Je t’ai perdu au moment où j’ai décidé de rester au Collège et massacrer le reste des goules. Si j’étais partie, tu ne serais pas dans cet état, si j’avais décidé de rester chez moi tout ca ne serait jamais arrivé ! »

Je me rendais compte que je sanglotais tandis que Matrim souriait légèrement. Il me raconta nos souvenirs. Le jour où j’avais rembarré un instructeur qui avait confondu une plante avec une autre, ce qui m’avait valu deux jours de colle, pas parce que je l’avais repris, mais parce que j’avais été arrogante et agressive. Mes sanglots se calmaient progressivement, les mots de Matrim m’apaisaient. Une fois tout notre passé revisité, il se redressa pour prendre ma dague. Il la fixa un instant et la plaça entre mes mains, appuyant la pointe vers son cœur et se rapprochant un peu pour que la pointe perce la peau sur un petit centimètre. Il tressaillit sous la douleur et me regarda avant de sourire et de m’embrasser, ses bras venant m’enlacer pour m’attirer contre lui. Le mouvement des corps se rapprochant fit son office et la lame transperça son cœur avec aisance et souplesse. Un soubresaut de la part de Matrim tandis que nos lèvres se quittaient. Il me regardait toujours, un sourire serein sur les lèvres et souffla.

« On se retrouvera, Alvi. N’oublie pas que je t’aime. »

Et son corps se dispersa au gré du vent, infimes particules de poussières qui s’envolèrent tandis que je me redressais en hurlant son nom. Il n’avait pas le droit ! Je retombais presque aussitôt à genoux pour enfouir mon visage au creux de mes mains et sangloter. J’avais tout perdu. Tout. Ma famille avait été tuée, mon collège était détruit…Et mon amour était mort. Je n’avais plus rien ! J’étais seule…si seule…
C’est alors que Lyam vint me lécher la figure, se frotter contre moi, mordiller ma main. Mes mains s’écartèrent de mon visage ruisselant d’onde salée. Un maigre sourire vint naitre sur mes traits. Oui il me restait Lyam…Et je continuerais à vivre pour lui. Je refermais mes bras autour de lui. C’était le seul être aimé qu’il me restait. Je lui promis tout bas de ne jamais abandonner, pas tant qu’il serait là à mes cotés. Parce qu’il était le seul à pouvoir me comprendre et qu’il était le seul que je pourrais jamais aimer. Je ne prenais pas encore conscience réellement de ce que ces promesses pourraient engendrer.
Je me mis à voyager, allant voir les endroits cités dans nos discussions avec Matrim. Les années passèrent ainsi et j’apprenais à me débrouiller en travaillant de façon plus ou moins honnête. Puis, comme je constatais que l’honnêteté ne menait pas à grande fortune, je me frottais à la contrebande. Pas très longtemps. Bientôt j’eus des ennuis. Et le problème c’est que je ne le sus pas tout de suite. Ce n’est qu’un jour, en sentant un bras m’élancer pour rien, puis une jambe, puis la tête que je compris qu’on s’en prenait à mon arbre. J’achetais un cheval et filait dans mon village natal pour ne découvrir que des ruines, des traces de massacre récent et quelques maisons qui brûlaient encore. Cela ne s’arrêtera donc jamais… ? Je poussais mon cheval sur la trace des brigands responsables de ceci, les retrouvant au pied de mon arbre, torche, hache et épée à la main. Je descends de mon cheval et je lève la main vers eux.

« Arrêtez ca ! »

« Nous arrêterons quand nous t’aurons définitivement mise hors d’état de nuire. Tu ne sais pas combien tu as fait perdre à celui qui nous engage avec tes embrouilles et tes manigances. »

« Me faites pas rire. Il avait qu’à ne pas se frotter à plus malin que lui. »

Et hop ! Une branche arrachée. Je me pliais de douleur et posais un genou à terre à la deuxième tranchée net. Haletante, je tentais de reprendre mes esprits et mon équilibre sur mes jambes. J’y arrivais avec effort. Le leader de la petite bande, ils étaient 5 au total, me toisa et me lança.

« Mais tu peux peut être éviter ca…Si tu acceptes de travailler gratuitement pour lui, je pense qu’il laissera ton cher arbre en paix. »

« Travailler gratuitement ? Vous rêvez. Et puis c’est un abruti, je bosse pas pour des abrutis ! »

Ce serait insulter mon intelligence. Bref. Ce n’était pas la réponse qu’ils attendaient visiblement. Les choses prirent une tournure réellement glauque que nous n’allons pas détailler ici. Je ressentais chaque coup de hache et chaque blessure de mon arbre…Je hurlais à la mort, les larmes roulant sur mes joues…Une fois l’opération terminée, la petite bande me laissa à genou, devant le noble cerisier qui s’était effondré à terre. La bouche ouverte, le regard hagard je contemplais cet arbre qui m’avait donné tant de forces et de courage. Je me sentais vide. Plus rien ne m’habitait, c’est comme si mon âme était partie en brisant mon cœur et qu’elle n’avait laissé ainsi derrière elle qu’une coquille vide. Lyam vint me lécher, il se frotta contre moi et me mordilla, parfois me griffa même pour obtenir une réaction qui ne vint pas. Mais chaque action ravivait une petite flamme, petite lueur enfouie sous la masse opaque de souffrance qui habitait mon être. Une voix me parvint comme à travers un cocon d’ouate.

« Tu dois te ressaisir à présent…Ton arbre est mort, si tu ne fais rien tu vas te laisser dépérir également et tu ne tiendras pas tes promesses. »

Je relevais la tête pour apercevoir Kalyn, enfin, ce qui me semblait être Kalyn. Il avait l’air plus vouté qu’avant et la voix était un peu plus tremblante. Il s’approcha de moi et mon regard vitreux le fixait, sans réelle vie ni motivation. Il se pencha et prit mes mains pour y glisser une carte.

« Vas à l’endroit indiqué. La bas tu trouveras un arbre roi. Le chemin est long et difficile. Mais cet arbre est spécial. Il ne peut être que le deuxième baptême d’un lutin. Rares sont les lutins qui ont assez de force une fois leur premier arbre mort pour aller jusqu’à lui. Si tu y arrives, il te donnera le pouvoir de continuer. »

« Kalyn…Je ne peux pas…je ne peux plus…je ne veux plus… »

La silhouette noire s’éloignait déjà tandis que mon regard sombre se portait sur Lyam. Il avait fixé ses prunelles émeraude sur moi et me contemplait avec espoir et confiance. Je ne pus sourire, mais mon cœur eut un léger pincement, signifiant qu’il m’en restait un…Contrairement à ce que j’avais pu penser. Je me relevais, comme un automate, puis me dirigeais vers ma monture pour la récupérer. Je contemplais ma carte d’un air morne et je me mis en route finalement. Plus vite j’y arriverais, plus vite je pourrais poursuivre ma vie. Mais sans motivation, ce fut bien plus dur que je ne m’y attendais. Plusieurs fois je faillis m’effondrer et me laisser mourir là où j’étais tombée. Plusieurs fois je manquais de m’endormir et de ne plus jamais vouloir me réveiller…Mais Lyam était avec moi. Et j’avais fait une promesse. J’étais de plus en plus fatiguée, les jours passaient et le voyage était long et pénible. Les derniers kilomètres à travers les marais furent les pires. Et enfin je le trouvais cet arbre roi. Il était au milieu d’une prairie qui semblait sans fin, se tenant droit et fier face aux intempéries. Il pleuvait en cette journée. Je m’approchais de lui et posais mes mains sur son tronc, sur son cœur, fermant les yeux. Je ressentis d’un coup toute sa solitude, toutes les tempêtes qu’il avait essuyée et desquelles il s’était toujours redressé. Je sentais son cœur dur et glacé, blindé à force d’être ignoré et laissé de coté. C’était l’arbre parfait pour moi. J’avais alors 30 ans. Je me baptisais, le lien s’étant déjà à demi fait, ce Châtaignier se reconnaissant dans mon cœur et moi dans le sien.
Alvierine - Lutin [En Construction] Chataignier
Kalyn avait dit vrai. Aussitôt le baptême achevé, c’est comme si je n’avais rien connu d’autre, mes douleurs passées étaient acceptées, mes aventures malencontreuses étaient présentes mais la souffrance était tolérable. Forte de cette nouvelle vie qui semblait couler dans mes veines je prenais la route des villes les plus proches pour trouver un travail honnête ou quelque chose du genre…Ou tout simplement voyager. Les soixante années que je passais ainsi me firent apprendre des choses, j’acquis bon nombre de connaissance, surtout dans l’art de parler et parfois même de manipuler les autres. Cette capacité s’accru avec le temps, plus je vieillissais, plus il était facile pour moi de tourner les événements à mon avantage. Je faisais parfois quelques quêtes faciles, jusqu’au jour…où je fus menée à mes deux futurs collègues. Un farfadet nommé Eden qui s’inquiétait toujours plus pour son argent que pour sa propre vie et un satyr nommé Zack qui lui ne se souciait pas de grand-chose à part de quelques tartes aux pommes et aux fraises. De vrais gamins. J’suis trop vieille pour ces conneries… !


Dernière édition par Sheithan le Lun 18 Juin - 11:07, édité 1 fois
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Alvierine - Lutin [En Construction] Empty Re: Alvierine - Lutin [En Construction]

Message  EG Jeu 10 Nov - 11:24

Une partie d'un passé très mouvementé !

Quels sont ses rêves pour son avenir ? et comment sont-ils nés ?

Votre rencontre, entre Gigue et Alviérine. J'aimerai bien la découvrir Smile


EG
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